01/12/2021

Olivia Burton, Mahi Grand, L’Algérie, c’est beau comme l’Amérique, coll. « 10 Ans », Steinkis, 7 oct. 2021, 177 p., 22 €. ISBN 9782368465417

Présentation de l'auteur. «  Lauréat du prix du festival BD de Sainte-Livrade - 2016

Petite-fille de pieds-noirs, Olivia a toujours entendu parler de l’Algérie. Mais ces récits familiaux lui pesaient : entre nostalgie, images de cartes postales et blessures de guerre, elle trouvait cet héritage plutôt gênant.

Dans les années 1990, alors que l’Algérie plonge dans la guerre civile, Olivia a envie d’en savoir plus sur l’histoire familiale. Elle demande à sa grand-mère d’écrire ses mémoires mais n’obtient d’elle qu’un sourire fatigué. Pourtant, en triant ses affaires après son décès, Olivia tombe sur un dossier qui lui est destiné. À l’intérieur : ses souvenirs d’Algérie.

Dix ans plus tard, elle décide d’aller sur place, pour confronter ces récits à la réalité.
Olivia part seule, avec dans ses bagages le numéro de téléphone d’un contact sur place, Djaffar.

Ce roman graphique raconte ce voyage : quête des origines, travail de la mémoire entre souvenirs et fantasmes, questionnement sur l’héritage, la honte et le sentiment d’exil et amitié improbable et cocasse entre les héritiers d’une histoire brûlante.
Une quête initiatique remplie de rencontres fortes et savoureuses, sensible et souvent drôle, le tout dans un décor de western et de barrages policiers ».


03/11/2021

Stein van Oosteren, Pourquoi pas le vélo ? Envie d'une France cyclable, Écosociété, 6 mai 2021, 200 pages, 16 euros. ISBN : 978 2897 197 131

Présentation de l'éditeur. « "Le vélo, c’est pour s’amuser et ça grille les feux rouges. C’est culturel. Ça ne marchera jamais en France".  "Le vélo, c’est dangereux !". Qui de mieux pour démonter ces idées reçues qu’un Néerlandais installé en France ? Peu savent que les Pays-Bas, reconnus comme le paradis du vélo, étaient eux-mêmes un "pays de la bagnole" dans les années 1970, avant que la population ne déclenche une révolution du vélo spectaculaire. Comme quoi la révolution de la pédale relève avant tout d’une volonté citoyenne et politique.
Avec un humour redoutable, Stein van Oosteren nous explique pourquoi il faut rendre le pays du Tour de France cyclable : parce que c’est bon pour la santé, le moral, l’autonomie des enfants, la vie de quartier, la planète… Il démonte les multiples freins à la pratique du vélo, qu’ils soient politiques ou bien souvent situés "entre nos deux oreilles". Car pour cet auteur rompu aux débats avec les élu.e.s municipaux,il est temps de se poser les bonnes questions à propos du transport. Par exemple, non pas combien de voitures peuvent circuler sur une rue, mais plutôt combien de personnes ? Une piste cyclable faisant passer sept fois plus de personnes qu’une voie pour les voitures, le calcul est vite fait !

Pour croire au changement, il faut le vivre. À défaut de pouvoir vous emmener aux Pays-Bas, Stein van Oosteren vous propose de revisiter l’espace public avec son regard de Néerlandais. De ce voyage, vous reviendrez heureux et étonné, comme vous revenez d’un séjour au royaume du vélo: pourquoi pas le vélo, en effet ? ». 

02/10/2021

Manuel Cervera-Marzal , Le Populisme de gauche. Sociologie de la France insoumise, La Découverte, coll. «Sciences humaines», 2 sept. 2021, 392 pages, 22 €. ISBN : 9782348054921


Présentation de l'éditeur. «Le 23 avril 2017, Jean-Luc Mélenchon rassemblait 19,58 % des voix lors du scrutin présidentiel, réalisant le meilleur score d’un candidat situé à la gauche du PS depuis 1969. À quoi tient cette réussite ? Comment expliquer la chute électorale qu’a ensuite connue son mouvement ? La France insoumise peut-elle rebondir en 2022 ? Manuel Cervera-Marzal s’est immergé trois ans durant au sein de ce parti et en aborde ici toutes les facettes (genèse, programme, stratégie, discours, idéologie, fonctionnement interne, base militante, direction et électorat).

Au fil de l’enquête, on comprend que, loin de constituer une exception, la France insoumise s’inscrit dans une dynamique internationale qui, après la crise de 2008, a vu émerger le populisme de gauche. À l’instar de Bernie Sanders, Jeremy Corbyn, Pablo Iglesias ou Alexis Tsipras, Jean-Luc Mélenchon a redéfini les règles du jeu politique, obligeant la gauche à se défaire de ses vieux réflexes. L’objectif : mettre un terme aux politiques néolibérales. Les moyens : délaisser les symboles traditionnels du mouvement ouvrier (le rouge, l’Internationale, etc.), réinvestir des thèmes traditionnellement accaparés par la droite (l’ordre, la nation, la souveraineté), se doter d’un leader charismatique, insuffler plus d’affects en politique et prendre appui sur les mobilisations sociales.
À partir de données empiriques d’une grande richesse, Manuel Cervera-Marzal propose ainsi une définition innovante du populisme de gauche et des clés de compréhension des enjeux politiques contemporains».

01/10/2021

Patrice Leconte (sc.), Jérôme Tonnerre (sc.), Alexandre Coutelis (ill., coul.), Deux Passantes dans la nuit, tome 2, « Anna », éd. Bamboo, coll. « Grand Angle », 1sup>er sept. 2021, 64 p. 16,90 €. ISBN 978-2-81897-548-0


Présentation de l'éditeur. « La longue nuit de deux jeunes femmes que tout oppose dans le Paris désert de l’Occupation.


Arlette sort de prison, heureuse d’être libre dans Paris occupé. Anna, magicienne, est flanquée à la porte du cabaret dans lequel elle se sentait à l’abri. Les chemins de ces deux femmes se croisent, le hasard sachant si bien organiser les rencontres inattendues. Autant Arlette est insouciante et légère, autant Anna semble se méfier de tout, comme si elle était traquée. Elles sillonneront en une nuit Paris, la Ville Lumière sans lumières, à la recherche de ce qui pourra leur sauver la vie, deviendront amies par la force des choses, ne pourront éviter les contrôles d’identité, les silhouettes sombres, les menaces diverses, les désillusions, toutes ces choses qui obligent à fuir, encore et toujours, jusqu’au lever du jour ». 


29/09/2021

Hervé Mazurel, L’Inconscient ou l’oubli de l’histoire. Profondeurs, métamorphoses et révolutions de la vie affective, La Découverte, coll. « SH / Écritures de l'Histoire », 2 sept. 2021, 592 p. ISBN : 9782707197085. 25 €


Présentation de l'éditeur. «Et si l’inconscient lui-même n’échappait pas à l’histoire ? En le situant au-delà du social, au-delà de l’histoire, Freud a laissé la psychanalyse prisonnière d’un postulat encombrant. Il a fait comme si la structure de la personnalité qu’il observait chez ses patients viennois à la fin du XIXe siècle touchait à l’homme éternel et non aux représentants d’une époque, d’une culture, d’un univers social particuliers.

Nourri d’histoire des sensibilités, de sociologie psychologique et d’anthropologie critique, ce livre voudrait montrer en quoi notre vie psychique profonde est tout imprimée d’histoire. Pour s’en convaincre, il n’est qu’à scruter, sur la longue durée, les lentes transformations du refoulement pulsionnel et du contrôle des émotions. Elles sont étroitement corrélées aux révolutions silencieuses de nos mœurs, aux altérations souterraines de notre vie affective, aux déplacements discrets des désirs et des interdits, des seuils de pudeur et des frontières de l’intime. De là il faut conclure à l’existence de troubles d’époque et de névroses de classe. Et puis songer aussi au perpétuel renouvellement des fantasmes à partir desquels se meuvent les êtres intérieurs, aux variations du symbolisme des rêves, calquées sur les évolutions de l’imaginaire social et non sur des archétypes universels, ou encore aux mutations sourdes des complexes psycho-affectifs (dont l’Œdipe) au gré des métamorphoses de la famille, de la parenté et des rapports de genre.

Cet ouvrage invite ainsi la psychanalyse et toutes les sciences psychologiques à considérer qu’il a sans doute fallu des siècles d’histoire pour façonner les inconscients qui sont les nôtres. Une chose paraît d’ailleurs certaine : à trop séparer la psyché du social-historique, nous avons longtemps ignoré jusqu’à quel point notre vie affective et psychique demeure, dans ses strates les plus enfouies et obscures, pétrie de social et d’histoire».


12/07/2021

Jean-C. Denis, Reliefs de l’Ancien Monde, Futuropolis, 2 juin 2021, 120 pages, 20 euros. ISBN : 9782754830843


Présentation de l'éditeur. « Reliefs de l’Ancien Monde est composé de récits (plus ou moins) courts. Certains ont été publiés dans la presse, d’autres sont totalement inédits. Récits drolatiques, fins et subtils, qui disent la vie telle que l’auteur l’a perçue, à la fin du siècle passé. Récits qui montrent, avec une acuité remarquable, que ces « reliefs » – ce qu’il reste de ces années ou ce qui en est la partie la plus aiguë – ressemblent à s’y méprendre aux temps actuels.
Le nouveau monde n’a pas complètement effacé l’ancien. Au fond, ces histoires sont prétextes à mettre en scène la vie ordinaire des gens. De ceux qu’on croise dans la rue, au bistrot ou que l’on côtoie en vacances… ».


10/07/2021

Benoît Collombat, Damien Cuvillier, Le Choix du chômage. De Pompidou à Macron, enquête sur les racines de la violence économique (préface de Ken Loach), Futuropolis, 10 mars 2021, 288 pages, 26 €. ISBN 978-2-7548-2545-0



Présentation de l'éditeur. « Un livre d’une brûlante actualité sur le choix des dirigeants européens, depuis le début des années 1980 jusqu’à aujourd'hui, de sacrifier l’emploi… et les effets dévastateurs de ce choix.
C’est une enquête fouillée, documentée, riche des témoignages d’anciens ministres, de conseillers de présidents de la République, d’anciens directeurs du Trésor ou du FMI, de banquiers, d’économistes, de juristes, de sociologues et de philosophes…

Benoît Collombat, journaliste à France Inter, a enquêté sur ce qui a fait basculer les choses : comment et pourquoi les hommes politiques ont « remis les clés » de l’organisation du monde à l’économie et à la finance. Ce basculement repose sur la victoire idéologique, à un moment donné, d’une pensée : le néolibéralisme, pour qui le rôle de l’État est avant tout de servir le marché.
Quelles personnalités sont à l’origine de ces grands choix économiques ? Quel rôle a joué la construction européenne ? Aujourd'hui, l’épidémie du coronavirus montre bien l’urgence de s’interroger sur ces choix politiques et économiques ».



Benoît Collombat, journaliste à France Inter depuis 1994, avait exploré la violence politique sous la Ve République, avec Étienne Davodeau. Cela avait donné l'excellent Cher Pays de mon enfance. Enquête sur les années de plomb de la Ve République (Futuropolis, 2015), qui a donné lieu à une recension dans ce site même. Cette fois, le journaliste a travaillé avec un autre dessinateur, Damien Cuvillier, sur un autre type de violence : la violence économique. Plus discrète, elle s'étale dans le temps depuis près de cinquante ans maintenant, ce qui fait que les victimes ne sont pas remarquées. L'album montre comment l'idée a émergé, et comment l'enquête s'est déroulée, prenant notamment appui sur l'expérience de la mère de Damien Cuvillier, radiée des listes de Pôle Emploi. Au-delà de ces cas individuels, au mieux trop souvent perçus comme les victimes malheureuses des circonstances, sinon comme responsables de leur destinée, au pire — on se rappelle le conseil cynique donné par un Macron désinvolte à un chômeur venu à l'Élysée, lui enjoignant de traverser la rue pour pouvoir travailler —, les auteurs entendent montrer que le chômage de masse qui s'est rapidement développé dans les années 1970 ne doit rien à la fatalité. Leur thèse repose aussi sur le fait que les différentes politiques économiques et sociales menées, en dépit des alternances (avec le « tournant » de 1983-1984, qui se dessinait sans fard déjà dès le discours de Mauroy devant l'Assemblée, le 8 juillet 1981) et des cohabitations, ne tiennent en réalité qu'au respect des normes de l'idéologie néo-libérale. Comme le montre François Denord, économiste, l'État est désormais au service du marché, lequel lui dicte la politique à suivre — on en a aujourd'hui une nouvelle illustration, avec l'industrie automobile pleurnichant après 17 milliards d'euros pour assurer sa compétitivité mondiale, pour, bien entendu sauvegarder l'emploi (pur chantage…). Au nom de ces principes, il a abdiqué de son pouvoir sur l'économie dès les années 1960 pour assurer la stabilité monétaire (celle du franc comme celle de l'euro aujourd'hui, avec les fameux critères dits de Maastricht) grâce à la rigueur budgétaire et à la lutte contre l'inflation, gages de la prospérité économique… mais pas pour tout le monde. Et dans cette configuration privilégiant les « grands équilibres », l'emploi que l'on prétend défendre, le cœur sur la main, n'est même pas considéré comme une variable d'ajustement : il ressort des pertes plutôt que des profits. En réalité, comme l'explique Ken Loach dans la préface, c'est un moyen commode de faire pression sur les salariés afin de briser leurs velléités et les syndicats : la quête du profit, camouflée derrière les courbes de la croissance économique, ne souffre aucun obstacle, surtout dans le contexte d'une économie mondialisée. Il s'agit de rogner sur les normes sociales pour assurer la meilleure compétitivité.

La violence économique est notamment exprimée par les chiffres, commode façon de masquer la désespérance de chaque individu. On voit Pompidou complètement abasourdi par le fait que le nombre de chômeurs dépasse les quatre cents mille. On en recensait 2,4 millions à la fin de 2020, selon l'INSEE, ce qui avait permis aux dirigeants de ce pays de s'auto-congratuler en voyant que le chômage était revenu à 8 % de la population active, après une baisse de 340 000.  Résultat grandiose évidemment attribué aux effets de la politique mise en place, mais surtout à la reprise de la consommation, ce qui n'avait alors été que peu souligné… Ce qui l'était encore moins, c'était que le chômage n'est pas le seul signe de la violence économique : il ne résume en rien la pauvreté. En 2018, toujours selon l'INSEE, la grande pauvreté touchait près de deux millions de personnes, et on sait que la crise du COVID a approfondi ce phénomène, et les inégalités sociales par la même occasion : des riches toujours plus riches ; des pauvres toujours plus pauvres. L'emploi est-il condamné ? On a célébré à gorges déployées  « ceux de la première ligne » envers qui toute la société avait une dette, durant le premier confinement, jurant que le monde « d'après » ne ressemblerait pas à celui « d'avant » : la fable n'a pas tenu bien longtemps. Pourtant, l'album montre que tous les économistes — pour ne citer que ce corps — ne respectent la vision orthodoxe développée à longueur d'éditoriaux dans les médias dominants. Des réponses alternatives existent. Mais en attendant, la contestation ne cesse de gonfler devant la surdité du pouvoir politique ; la seule réponse consiste en un renforcement de la répression policière, des mesures sécuritaires et attentatoires aux libertés fondamentales. En guise de conclusion, le journaliste de Médiapart, Romaric Godin, en appelle à l'État pour qu'il crée les emplois que le secteur privé rechigne à réaliser.   

Les auteurs auraient pu sombrer dans un essai très technique pour asseoir leur démonstration rigoureuse. Au contraire, ils montrent la progression de leur enquête, nourrie par des entretiens avec des économistes, bien sûr, mais aussi des sociologues, des hommes politiques (quelques uns…), etc. On a ainsi un va-et-vient entre les propos des protagonistes de cette période (ceux qui ont toutefois accepté de témoigner) et une analyse scientifique. La documentation accumulée doit empêcher le lecteur hâtif de s'en tenir au titre, en estimant qu'il y a un complot : au contraire, rien n'est caché pour celui qui veut voir. Le Choix du chômage contribuera à éclairer la nuit des aveugles, grâce à un effort de vulgarisation qui met cet album très copieux et très fourni (288 pages, tout de même) à la portée de n'importe qui. Cela rappelle le côté didactique d'un autre ouvrage paru également chez Futuropolis (décidément…) en 2012 : La Survie de l'espèce, de Paul Jorion et Grégory Maklès. Le côté absurde et la dérision en moins. Quoi que… Ici, la réalité se suffit amplement à elle-même.



Jean-Yves Le Naour (sc.), Iñaki Holgado et Marko (ill.), Aretha Battistutta (coul.), <i>Le réseau Comète. La ligne d'évasion des pilotes alliés</i>, Bamboo, coll. « Grand Angle », 56 p., 31 mai 2023. ISBN 978 2 8189 9395 8

Présentation de l'éditeur . « Des centaines de résistants de « l’armée des ombres », discrets, silencieux, un « ordre de la nuit » fait...