28/10/2016

Gilles Perret, La Sociale, Rouge productions (prod. et diff.), 1 h 24, 9 novembre 2016

Gilles Perret, La Sociale, Rouge productions (prod. et diff.), 1 h 24, 9 novembre 2016
 
Présentation du diffuseur. « Il y a 70 ans, les ordonnances promulguant les champs d’application de la sécurité sociale étaient votées par le Gouvernement provisoire de la République. Un vieux rêve séculaire émanant des peuples à vouloir vivre sans l’angoisse du lendemain voyait enfin le jour. 
 
Le principal bâtisseur de cet édifice des plus humaniste qui soit se nommait Ambroise Croizat. Qui le connaît aujourd’hui ?
 
70 ans plus tard, il est temps de raconter cette belle histoire de « la sécu ». D’où elle vient, comment elle a pu devenir possible, quels sont ses principes de base, qui en sont ses bâtisseurs et qu’est-elle devenue au fil des décennies ?
 
Au final, se dresseront en parallèle le portrait d’un homme, l’histoire d’une longue lutte vers la dignité et le portrait d’une institution incarnée par ses acteurs du quotidien ». 
 

19/04/2016

Cyril Dion, Demain. Un nouveau monde en marche, éd. Actes Sud, coll. « Domaine du possible », nov. 2015, 360 p., 22 euros. ISBN : 978-2-330-05585-1


 


Présentation de l'éditeur. « Et si montrer des solutions, raconter une histoire qui fait du bien était la meilleure façon de résoudre les crises écologiques, économiques et sociales que traversent nos pays ?

En 2012, Cyril Dion prend connaissance d’une étude, menée par vingt-deux scientifiques de différents pays, annonçant la disparition possible d’une partie de l’humanité d’ici à 2100. Cette nouvelle fait à peine l’objet d’un traitement de seconde zone dans les médias. Considérant qu’amplifier le concert des catastrophes ne fonctionne pas, il décide de partir, avec l’actrice-réalisatrice Mélanie Laurent et une petite équipe, découvrir à quoi notre monde pourrait ressembler si nous mettions bout à bout certaines des meilleures solutions que nous connaissons déjà dans l’agriculture, l’énergie, l’économie, l’éducation et la démocratie.

Villes produisant elles-mêmes leur nourriture et leur énergie, systèmes zéro déchet, entrepreneurs et municipalité créant leur propre monnaie pour empêcher la spéculation et l’accaparement des richesses, peuples réécrivant eux-mêmes leur Constitution, systèmes éducatifs pionniers, ils découvrent partout des femmes et des hommes qui changent le monde.

En reliant ces initiatives, ils mettent au jour une nouvelle philosophie, une communauté de pensée entre tous ces acteurs qui ne se connaissent pas. Un nouveau projet de société… ».
 
 
Le succès grandissant du film1 ne doit pas occulter le livre qui en est tiré2 . En réalité, les deux sont complémentaires l’un de l’autre, le plan identique offrant des repères bien pratiques à ceux qui ont vu le film (ce qui avait été mon cas) ou lu le livre. Il aurait été regrettable de faire autrement, car l’enchaînement des thèmes a fait l’objet de transitions bien justifiées : on sent toute la réflexion qui a présidé à la construction de Demain. La lecture permet de mieux percevoir ce travail et sa limpidité.

Par son format temporel (118′), le film ne pouvait évidemment que ramasser les informations que contient le livre en plus grand nombre. Les entretiens qu’a eus Cyril Dion avec ses interlocuteurs sont plus développés, et on peut ainsi entrer davantage dans les détails. On a également quelques références bibliographiques, dont on peut regretter qu’elles ne soient pas plus nombreuses et rassemblées en fin de volume : Demain aurait alors alors pu constituer une sorte de manuel à l’usage de ceux qui voudraient découvrir les alternatives mises en œuvre un peu partout dans le monde et voudraient approfondir leur réflexion sur le sujet. Mais on a déjà de quoi faire : il ne s’agissait pas non plus d’établir une thèse définitive. Quoi qu’il en soit, avoir le livre entre les mains permet de pouvoir prendre le temps de réfléchir au propos de l’auteur3, qui se place résolument à l’opposé des alarmistes. Sans perdre de vue les risques importants que court la planète et l’humanité (entre autres espèces vivantes), le pari est de montrer qu’il est possible d’agir, à quelque échelle que ce soit, et quel que soit le niveau de revenu : «partout dans le monde, des solutions existent». Entre les moyens utilisés à San Francisco pour recycler les rejets (considérés en réalité comme des ressources potentielles) et l’indigence de ceux qui sont mobilisés à Kuthambakkam par son ancien maire, Elango Rangaswamy, il y a tout un monde. Place est faite aux initiatives de quelques personnes, comme Pamela Warhurst et Mary Clear qui sont à l’origine en 2008 du mouvement « Incredible Edible »4, qui s’appuie aujourd’hui plus de 700 groupes dans le monde. C’est la même chose avec Robert Hopkins, formé à la permaculture, et qui a contribué à lancé le mouvement des villes en transition, il y a une dizaine d’années, qui sont aujourd’hui plus de 1 200 dans 47 pays différents.
Les interlocuteurs et les initiatives retenues ne sont qu’une poignée parmi tous ceux qui n’acceptent la fatalité, mais tous inspirent un certain enthousiasme. Le style assez descriptif contribue à le faire passer ; même si on peut être agacé par les états d’âme de l’auteur, cela contribue à rendre le livre plaisant à lire. Mais c’est aussi un moyen de suivre l’évolution de sa pensée, à l’image du néophyte qu’il feint d’être, qui découvrirait les solutions d’un « monde en marche ».


Notes

  • 1. 950 000 entrées à la mi-avril 2016
  • 2. Si le livre a été publié en novembre, le film n’est sorti en salles le 2 décembre 2015
  • 3. Notamment pour les aspects techniques qui concernent la monnaie
  • 4. Les « Incroyables comestibles »

18/11/2015

Cyril Dion, Mélanie Laurent, Vincent Mahé (ill.), Demain. Les aventures de Léo, Lou et Pablo à la recherche d’un monde meilleur !, co-éd Actes Sud junior et L’Amandier, 18 nov. 2015, 86 pages, 24 €. ISBN : 978-2-330-05620-9


Présentation de l’éditeur. « Mélanie Laurent, actrice et réalisatrice engagée, et Cyril Dion, cofondateur de l’association Colibris, se sont associés pour réaliser Demain, un film qui recense les initiatives d’hommes et de femmes de tous pays pour changer positivement, à travers leur pratique, la vie des habitants de notre planète. Mélanie et Cyril ont traversé le monde et rencontré plusieurs de ces héros modernes. Le livre-CD est un autre aboutissement de ce voyage raconté ici à travers le regard de deux enfants ».

 

 

 

En fait d’ouvrage pour la jeunesse, Demain. Les aventures de… est un livre-CD, puisqu’on a l’enregistrement de « Léo à sa fenêtre », une histoire écrite et racontée par Mélanie Laurent, en plus du récit des tribulations de Lou et de son frère Pablo.

Le livre s’inspire assez librement du film de Cyril Dion et Mélanie Laurent, Demain [1], diffusé en décembre dernier, et qui connaît un certain succès depuis trois mois (près de 700 000 entrées). La bande de papier qui entoure l’ouvrage est illustrée d’une photographie qui montre quatre des protagonistes du film. Pour autant, il ne s’agit de sa simple reprise, adaptée à un public jeune. L’histoire concerne en effet une famille : Lou (10 ans) et Pablo (7 ans), donc, et leurs parents. Un couple, une fille, un garçon : la famille idéale.

Le point de départ est constitué par une alerte à la pollution qui se produit le matin, à l’école, et par la projection d’un dessin animé lors du repas à la cantine sur les méfaits de l’alimentation industrielle : déforestation, élevage en batterie, etc. Ces deux événements marquent Lou (qui sert de narratrice, non sans un certain humour), laquelle interroge son père, dont les réponses sont très pessimistes : à cause de la surexploitation des ressources, l’humanité pourrait disparaître, après avoir causé l’extinction de nombreuses espèces vivantes. La conversation s’achève sur ce constat. Mais les enfants n’entendent pas en rester là : ils imaginent que des solutions doivent exister. Les prochaines grandes vacances sont l’occasion de parcourir le monde pour aller à la rencontre des personnes qui n’acceptent pas cette situation et cherchent à s’opposer au monde tel qu’il est. Le père prend les choses en main ; la suite de l’histoire en fait pourtant un personnage ambigu. S’il prépare le voyage, c’est qu’il détient une information sur les alternatives, auxquelles il est un tant soit peu sensibilisé. Néanmoins, les auteurs en font un grincheux, un sceptique accroché à ses convictions et assez peu ouvert, contestant jusqu’à l’absurde : un être finalement assez réactionnaire.
Mais il n’empêche que le grand voyage commence et emprunte les mêmes étapes que le film. Les thèmes y sont abordés dans le même ordre ; mais ils reposent sur une situation en particulier qui leur sert de cadre à chaque fois. Les auteurs ont imaginé que Lou envoyait une carte postale à l’un de ses amis, Gaspard, ce qui permet d’évoquer d’autres situations que le cadre du film ne permet pas de développer.
La famille arrive en Normandie et visite la ferme de Perrine et Charles [2], qui pratiquent la permaculture, ou comment obtenir des rendements importants sur des parcelles restreintes, tout en travaillant à la main (ce qui permet de créer des emplois) et en respectant sinon en restaurant le milieu (et les hommes). L’exact contraire du système agricole intensif.
La destination suivante est Copenhague, où Else leur sert de guide. C’est l’occasion d’aborder la question de l’énergie et du transport. La capitale du Danemark fait en effet la part belle aux moyens de déplacement « doux » : la marche à pied, le vélo, les transports en commun. La circulation y est rapide, à un coût moins important (moins d’énergie consommée, moins de pollution), avec un bénéfice physique et sanitaire intéressant. Mais les Danois sont aussi impliqués dans la production d’électricité, puisqu’ils possèdent des éoliennes et des panneaux photovoltaïques en copropriété. Le projet de Copenhague est de parvenir à n’utiliser que des ressources renouvelables dans les dix années à venir.
Arrivés en Californie, les membres de la famille rencontrent Robert qui leur explique comment sont gérés les déchets, considérés avant tout comme des ressources à valoriser. Cela impose un tri assez poussé auxquels la population contribue. L’objectif de San Francisco est d’arriver à 100 % de déchets recyclés ou compostés en 2020, alors que l’agglomération en est déjà à 80 %.
À Bristol, la famille découvre ce que sont les monnaies locales. Là où le film est assez technique, les auteurs utilisent une histoire assez connue : celle de naufragés qui échouent dans une île déserte. Doués de compétences différentes, ils organisent un système de production et d’échange basé sur le troc. Arrive un autre naufragé, banquier, qui parvient à les convaincre que la monnaie peut être un moyen de faciliter les échanges : ils peuvent alors être différés dans le temps. Mais le tout est subordonné au fait que le banquier prête aux insulaires une monnaie qu’il a créée et dont il a le monopole, d’une part, et que, d’autre part, les emprunteurs doivent rembourser sans oublier de verser un intérêt en contrepartie du service rendu. La monnaie émise introduit un principe de rareté : il n’est pas permis d’en créer davantage, sous peine d’en diminuer la valeur. Mais on voit que si certains parviennent à rembourser, d’autres ne le peuvent pas : surendettés, ils finissent par être alors exclus du circuit économique. Mais surtout, le grand bénéficiaire est le banquier, puisqu’il s’approprie progressivement les biens des impécunieux, tout en s’enrichissant avec les intérêts versés par les autres, et se rend finalement rendu maître de l’ensemble du processus de décision politique, tandis que l’appauvrissement s’étend. Les insulaires finissent par en prendre conscience et à rejeter le système bancaire qui les asservit : le travail n’avait plus d’autre but que d’obtenir les moyens de faire face au remboursement des emprunts contractés. Ils gardent néanmoins le principe d’une monnaie, mais dont ils gardent la maîtrise entière et sans versement d’un intérêt. Les monnaies locales fonctionnent sur cette idée, dans un secteur géographique déterminé, ce qui permet de maintenir l’activité économique localement : les emplois sont de ce fait aussi mieux protégés. La monnaie nationale est utilisée pour acheter d’autres biens et services. Il y a donc complémentarité entre les deux systèmes, ce qui assure une meilleure diversité [3] et renforce la démocratie.

C’est cet approfondissement qui est également recherché par Elango, l’ancien maire de Kuttambakkam, en Inde. Il a créé des assemblées de citoyens, associées aux projets concernant la communauté des habitants. Les décisions prises, elles sont mises en œuvre par tout le monde. En outre, un système de micro-crédit est instauré, sans intérêt, ce qui a permis aux femmes, notamment, de parvenir à une certaine émancipation. Enfin, Elango a favorisé le rapprochement entre castes, avec l’édification d’un quartier mixte construit par ses futurs habitants.
Enfin, la famille parvient en Finlande, dans la banlieue défavorisée d’Helsinki, où elle est accueillie par Kari, le directeur d’une école. Les enfants sont étonnés en découvrant les faibles effectifs des classes (une quinzaine d’élèves), encadrées par deux adultes : cela permet de répondre aux besoins de ceux qui ont des difficultés. Tout le monde progresse. Kari leur indique qu’il n’y a pas d’inspection : le système repose sur la confiance. L’argent ainsi économisé est consacré à rémunérer les adultes qui sont dans les classes, à assurer leur formation. En outre, les élèves ont des activités très diversifiées : en plus des matières scolaires habituelles et des pratiques artistiques (musique, etc.), ils sont initiés à des travaux manuels comme la cuisine, la couture tout aussi bien que la réalisation d’objets en bois, en métal… En même temps que les élèves acquièrent une meilleure autonomie, les métiers techniques sont valorisés au titre que les autres, tandis qu’est atténuée la différenciation des activités entre filles et garçons. Enfin, le climat de l’école repose sur la confiance, l’empathie : les élèves doivent se sentir respectés, sécurisés, de façon à ce qu’ils respectent aussi les autres. À plus long terme, toutes ces pratiques visent à construire une société d’êtres responsables, capables de s’impliquer dans les décisions qui concernent l’ensemble de la communauté.
De retour chez elle, Lou raconte ce qui a changé dans sa vie. Sa famille (et même le père) a mis en œuvre certaines des solutions : trier, composter, semer, planter, respecter la nature et les autres.
Un résumé de ce qu’il est possible de faire à l’échelle individuelle d’un enfant est proposé sur deux pages.

Si l’histoire est simplifiée, par rapport au film, l’ouvrage demande la présence d’un adulte qui pourra apporter les explications aux questions que se posera inévitablement un enfant : j’en ai fait l’expérience avec l’un de mes fils âgé de huit ans. Je dois indiquer qu’il avait vu le film et l’avait beaucoup apprécié (ce qui ne le réserve donc pas aux adultes), et avait posé beaucoup de questions en s’interrogeant sur ses propres pratiques et celles de notre famille. En cela, l’initiative des auteurs ne se borne pas à seulement montrer : elle stimule la réflexion, même des plus jeunes, et invite à passer à l’action. Les parents doivent donc s’attendre à se remettre (ou à être remis) en cause…
Le livre permet de revenir sur ces éléments (ou de les initier, si le film n’a pas été vu, ce qui n’est pas une condition indispensable) : il pourra constituer la base d’un travail en classe ou à domicile, notamment sur le parcours géographique suivi qui pourra être retracé sur un planisphère (ou, mieux, un globe).
En revanche, le récit de Léo à sa fenêtre peut être laissé à l’écoute ou à la lecture (voire les deux en même temps) de l’enfant. La solidité du livre (une couverture très épaisse et une reliure de qualité : rien n’est négligé) offre d’ailleurs une bonne garantie pour sa manipulation. « Léo à sa fenêtre » peut tout aussi bien être un préalable aux aventures de Lou et Pablo que leur conclusion : plus court, plus simple, il est aussi plus accessible.

En résumé, le livre-CD s’adresse plutôt à des enfants d’environ sept ou huit ans au moins (ce qui correspond à peu près à l’âge de Lou et Pablo), même s’ils ne maîtrisent pas tout à fait la lecture. En-deçà (avec un enfant de cinq ans, par exemple), le récit demande un effort de concentration incisions prises, elles sont mises en œuvre par tout le monde. En outre, un système de micro-crédit est instauré, sans intérêt, ce qui a permis aux femmes, notamment, de parvenir à une certaine émancipation. Enfin, Elango a favorisé le rapprochement entre castes, avec l’édification d’un quartier mixte construit par ses futurs habitants.
Enfin, la famille parvient en Finlande, dans la banlieue défavorisée d’Helsinki, où elle est accueillie par Kari, le directeur d’une école. Les enfants sont étonnés en découvrant les faibles effectifs des classes (une quinzaine d’élèves), encadrées par deux adultes : cela permet de répondre aux besoins de ceux qui ont des difficultés. Tout le monde progresse. Kari leur indique qu’il n’y a pas d’inspection : le système repose sur la confiance. L’argent ainsi économisé est consacré à rémunérer les adultes qui sont dans les classes, à assurer leur formation. En outre, les élèves ont des activités très diversifiées : en plus des matières scolaires habituelles et des pratiques artistiques (musique, etc.), ils sont initiés à des travaux manuels comme la cuisine, la couture tout aussi bien que la réalisation d’objets en bois, en métal… En même temps que les élèves acquièrent une meilleure autonomie, les métiers techniques sont valorisés au titre que les autres, tandis qu’est atténuée la différenciation des activités entre filles et garçons. Enfin, le climat de l’école repose sur la confiance, l’empathie : les élèves doivent se sentir respectés, sécurisés, de façon à ce qu’ils respectent aussi les autres. À plus long terme, toutes ces pratiques visent à construire une société d’êtres responsables, capables de s’impliquer dans les décisions qui concernent l’ensemble de la communauté.
De retour chez elle, Lou raconte ce qui a changé dans sa vie. Sa famille (et même le père) a mis en œuvre certaines des solutions : trier, composter, semer, planter, respecter la nature et les autres.
Un résumé de ce qu’il est possible de faire à l’échelle individuelle d’un enfant est proposé sur deux pages.

Si l’histoire est simplifiée, par rapport au film, l’ouvrage demande la présence d’un adulte qui pourra apporter les explications aux questions que se posera inévitablement un enfant : j’en ai fait l’expérience avec l’un de mes fils âgé de huit ans. Je dois indiquer qu’il avait vu le film et l’avait beaucoup apprécié (ce qui ne le réserve donc pas aux adultes), et avait posé beaucoup de questions en s’interrogeant sur ses propres pratiques et celles de notre famille. En cela, l’initiative des auteurs ne se borne pas à seulement montrer : elle stimule la réflexion, même des plus jeunes, et invite à passer à l’action. Les parents doivent donc s’attendre à se remettre (ou à être remis) en cause…
Le livre permet de revenir sur ces éléments (ou de les initier, si le film n’a pas été vu, ce qui n’est pas une condition indispensable) : il pourra constituer la base d’un travail en classe ou à domicile, notamment sur le parcours géographique suivi qui pourra être retracé sur un planisphère (ou, mieux, un globe).
En revanche, le récit de Léo à sa fenêtre peut être laissé à l’écoute ou à la lecture (voire les deux en même temps) de l’enfant. La solidité du livre (une couverture très épaisse et une reliure de qualité : rien n’est négligé) offre d’ailleurs une bonne garantie pour sa manipulation. « Léo à sa fenêtre » peut tout aussi bien être un préalable aux aventures de Lou et Pablo que leur conclusion : plus court, plus simple, il est aussi plus accessible.

En résumé, le livre-CD s’adresse plutôt à des enfants d’environ sept ou huit ans au moins (ce qui correspond à peu près à l’âge de Lou et Pablo), même s’ils ne maîtrisent pas tout à fait la lecture. En-deçà (avec un enfant de cinq ans, par exemple), le récit demande un effort de concentration important ; pour autant, l’écoute du CD peut être envisagée.
Quoi qu’il en soit, la forme du livre-CD permet d’éveiller la curiosité d’un public relativement jeune, qui, si des questions se posent encore, pourra voir des extraits du film pour aller plus loin, ce qui n’exclue pas, bien au contraire, la présence d’un adulte. Les aventures de Léo, Lou et Pablo sont à recommander.

Lu et approuvé par Martin, 8 ans…

portant ; pour autant, l’écoute du CD peut être envisagée.
Quoi qu’il en soit, la forme du livre-CD permet d’éveiller la curiosité d’un public relativement jeune, qui, si des questions se posent encore, pourra voir des extraits du film pour aller plus loin, ce qui n’exclue pas, bien au contraire, la présence d’un adulte. Les aventures de Léo, Lou et Pablo sont à recommander.

Lu et approuvé par Martin, 8 ans…


Notes

[1Voir le compte rendu du livre qui l’a inspiré, sur ce même site.

[2Perrine et Charles Hervé-Gruyer

[3L’association des plantes est aussi l’une des bases de la permaculture : complémentaires les unes les autres, elles résistent mieux aux maladies et aux prédateurs.













08/10/2015

Étienne Davodeau et Benoît Collombat, Cher Pays de notre enfance. Enquête sur les années de plomb de la Ve République

Étienne Davodeau (ill.) et Benoît Collombat (sc.), Cher Pays de notre enfance. Enquête sur les années de plomb de la Ve République, éd. Futuropolis, 8 oct. 2015, 224 pages, 24 . ISBN : 9782754810852

 

 
Présentation de l'éditeur. « Étienne Davodeau est auteur de bande dessinée. Benoît Collombat est grand reporter à France Inter. L'un est né en 1965, l'autre en 1970.
Ils ont grandi sous la Ve République fondée par le général de Gaulle, dans un pays encore prospère, mais déjà soumis à la « crise ».

L'Italie et l'Allemagne ne sont pas les seules nations à subir la violence politique. Sous les présidences de Pompidou et de Giscard d'Estaing, le pays connaît aussi de véritables « années de plomb » à la française.
Dans ces années-là, on tue un juge trop gênant. On braque des banques pour financer des campagnes électorales. On maquille en suicide l'assassinat d'un ministre. On crée de toutes pièces des milices patronales pour briser les grèves. On ne compte plus les exactions du Service d'Action Civique (le SAC), la milice du parti gaulliste, alors tout-puissant. Cette violence politique, tache persistante dans l'ADN de cette Ve République à bout de souffle, est aujourd'hui largement méconnue.
En sillonnant le pays à la rencontre des témoins directs des événements de cette époque — députés, journalistes, syndicalistes, magistrats, policiers, ou encore anciens truands —, en menant une enquête approfondie, Étienne Davodeau et Benoît Collombat nous révèlent l'envers sidérant du décor de ce qui reste, malgré tout, le cher pays de leur enfance... ».
 
 

06/08/2015

Vincent Goubet, Faire quelque chose. Avoir Vingt ans en 1940, suivi de Et le mot frère, et le mot camarade, éd. Les Mutins de Pangée, 2013, 80', 20 €

Vincent Goubet, Faire quelque chose. Avoir Vingt ans en 1940 (avec livret, 64 p.), suivi de Et le mot frère, et le mot camarade, éd. Les Mutins de Pangée, 2013, 80', 20 €

 

  Présentation du diffuseur. « À la rencontre de résistants français de la Seconde Guerre mondiale. Le réalisateur recueille la parole de ces nonagénaires saisissants par leur vivacité d’esprit et la force intacte de leurs espérances. Des femmes et des hommes, qui, au début des années 40, étaient parfois plus proches de l’adolescence que de l’âge adulte. Certains n’ont jamais connu la peur, d’autres ont vécu avec elle jour et nuit. Certains ont pris des risques énormes pour faire paraître un tract, quand d’autres ont choisi la grenade. Ce qui les rapprochait était le choix de ne pas subir et la volonté irréductible de faire quelque chose. Ces échanges font évoluer le temps du film et nous questionnent sur ce que peut être l’engagement aujourd’hui.

Le Dvd est composé du film Faire quelque chose de Vincent Goubet et du film Et le mot frère et le mot camarade de René Vautier, accompagné d’un livret de 64 pages sur la Résistance. ».

 

10/06/2015

Florence Dosse, Les Héritiers du silence. Enfants d’appelés en Algérie

Florence Dosse, Les Héritiers du silence. Enfants d’appelés en Algérie, Stock, coll. « Un ordre d'idées », 282 pages, 25 janvier 2012, 20 €. EAN : 9782234071643

 

05/03/2015

René Vautier en Algérie, 1954-1988, Les Mu­tins de Pangée, 2014. Quatre DVD et un livret d’ac­compagnement. EAN 3770001117195


Les éditions Mutins de Pangée reviennent avec un coffret DVD sur le parcours en Algérie de René Vautier, récemment disparu.

De René Vautier, mort il y a deux mois, en janvier 2015, on connaît surtout le célébrissime Avoir Vingt Ans dans les Aurès (1972, 102′). Et dès que l’on a mis la main sur le coffret édité par la coopérative Les Mu­tins de Pangée (2014), on ne peut s’empêcher de se précipiter dessus : c’est bien évidemment ce que j’ai fait, d’autant que le film est présent ici en version restaurée, telle qu’elle est sortie en salle en 2012. Avoir Vingt Ans a en outre fait l’objet d’un site Internet : cela faisait beaucoup pour que j’ajoute ma graine. Je le ferai toutefois, mais à la lumière des nombreux autres films que contient le coffret (525′, sans compter les 98′ de compléments sous forme d’entretiens), qui concernent principalement l’Algérie telle que l’a connue René Vautier, et permettent de retracer une grande partie de son parcours avec ce qui apparaît comme l’un de ses fils directeurs.

Le coffret permet de voir René Vautier comme acteur direct du conflit colonial, notamment avec Algé­rie en flammes (22′, 1958), au cours du tournage duquel il est blessé à trois reprises : aux prises directes avec l’action du FLN, il filme les soldats français qui le visent et atteignent sa caméra, dont un morceau reste incrusté dans son crâne. Au-delà de cette anecdote spectaculaire, mais qui indique assez le degré d’implica­tion et les risques assumés par le cinéaste (qui a dû faire sien le principe de Robert Capa : si une photogra­phie est mauvaise, c’est qu’on n’est pas assez près de son sujet), le film, tourné en 1957-1958, cherche à montrer la proximité entre la rébellion armée et la population algérienne, dont l’effort commun ne peut que parvenir à l’indépendance. Le parallèle avec la lutte de la Résistance française est très prégnant. En plus de sa propre expérience de combattant au sein d’un réseau, on sent quelles sont les sources d’inspiration de René Vau­tier : le déraillement d’un train militaire évoque immanquablement Bataille du rail de René Clé­ment (1946). À ce détail près que l’occupant dénoncé par le film a changé en l’espace d’une dizaine d’an­nées…


On retrouve René Vautier comme cinéaste engagé aux côtés de la jeune République socialiste. Ve­nant de créer le Centre audiovisuel d’Alger, il réalise notamment Peuple en marche (50′, 1963), qui montre les difficultés du pays qui vient d’arracher son indépendance, notamment au regard des défis de sa recons­truction et de son développement économique et social. Tournée vers son ancienne métropole et avec un très faible encadrement, l’Algérie doit accomplir une formidable mutation. L’heure du pouvoir autoritaire des militaires n’est pas encore venue, et on ne voit pas que René Vautier l’ait pressentie, porté par l’enthou­siasme des premières années de liberté et de la tâche à laquelle il se consacre. Il s’agit véritablement de la naissance d’une nation, pour reprendre le titre de l’un des films de D. W. Griffith (The Birth of a Nation, 1915).

Revenu en France en 1966, tout en s’intéressant à d’autres thèmes, le militant reste fixé sur son sujet de prédilection, mais il réoriente son regard en cherchant à prendre du recul et à considérer les deux côtés de la Méditerranée. René Vautier devient une sorte de mémorialiste (si ce terme peut s’appliquer au cinéma, mais pourquoi pas, après tout), qui ne se cantonne pas à un rôle de contemplatif, mais un observateur sou­cieux de comprendre et de rendre compte de la façon dont la guerre de décolonisation est devenu un enjeu aussi bien en France qu’en Algérie.


Il recueille ainsi des heures de témoignages, et travaille notamment sur la façon dont l’Histoire de la guerre d’Algérie se construit alors, que ce soit pour la résurgence de la torture (À propos de… l’autre détail, 1988), sans oublier l’immigration algérienne (avec les deux fictions Les Ajoncs, et Les Trois Cousins, 1970). En 1985, René Vautier reprend l’un de ses premiers flms, Une Nation : l’Algérie (1955) — malheureusement absent du coffret — et cherche à comprendre les causes du nationalisme algérien et de la dérive vers le guerre d’indépendance. Cela donnera notamment Déjà le sang de mai ensemençait novembre (61′), en 1985. La même année, il analyse également le rôle des films sur le conflit (Guerre aux images en Algérie, 73′), y compris les images que René Vautier a lui-même tournées. Les 15 minutes de Techniquement si simple (1971) sont, à ce titre, d’une efficacité terrifiante. On assiste au monologue d’un personnage d’une extrême banalité ; toutes proportions gardées, tant dans les faits que dans la dimension et les responsabili­tés du personnage, on ne peut s’empêcher de considérer ce témoignage comme un autre rapport sur la ba­nalité du mal. Ancien appelé du contingent filmé chez lui, celui-ci raconte d’une façon très détachée ce qu’il faisait, à savoir poser des mines, sans jamais s’interroger sur les répercussions de ses actes : il obéît. Vau­tier le filme en noir et blanc, ce qui renforce encore la distanciation du propos de son interlocuteur et de ce qui a été commis. Le ton de la relation m’a rappelé l’aimable conversation entre Marcel Ophüls et Christian de la Mazière (ou plutôt Christian Lamazière), dans Le Chagrin et la pitié (1971, étonnamment), sans l’atti­tude mondaine de celui-ci, mais avec une certaine désinvolture dans l’irresponsabilité. Confronté en effet à des enfants mutilés par son partenaire algérien d’alors, l’ancien appelé s’étonne même avec véhémence de l’absence de courtoisie et de tact de son camarade, réaction tout à fait symptomatique de la profonde mé­connaissance de l’Algérie par les Français qui y furent précipités, et de l’inconséquence des actes commis en toute légalité.

Des enfants, il en est encore question dans J’ai huit ans (1961), très court métrage dans lequel René Vautier montre le traumatisme de la guerre chez de très jeunes réfugiés algériens, orphelins, en Tunisie, dont la naïveté des dessins ne cherche pas à camoufler la douleur physique et psychologique, notamment celle de l’arrachement au pays.

Le coffret n’est cependant pas complet. On regrette notamment de n’avoir pas Une Nation : l’Algérie (1955), qui est probablement le premier film sur la guerre d’indépendance, qui éclate au moment où René Vautier termine son travail préparatoire à partir de documents d’archives et notamment de textes des géné­raux qui ont fait la conquête du pays. Mais il en est d’autres, qu’il a réalisé seul ou en collaboration avec des partenaires, ou auxquels il a beaucoup contribué : Ahmed et Jeïda, 1960-1961, L’Aube des damnés, dont il confie la réalisation à Ahmed Rachedi, ou La Nuit du dernier recours (1984), à partir de témoignages fran­çais et algériens sur l’insurrection de la Toussaint rouge.

On regrette plus encore les kilomètres de pellicules qui ont été saccagés en 1984, sur lesquelles Re­né Vautier avait filmé entre 1980 et 1985 des entretiens, notamment avec des protagonistes importants de cette guerre (Massu, Germaine Tillon, Paul Teitgen, Argoud, de Bollardière, etc.) mais aussi des anonymes. Initialement intitulé Des Images pour écrire l’Histoire, le film a fait l’objet d’un montage qui a été produit en 1985 devant la 17e Chambre correctionnelle de Paris, en soutien au Canard enchaîné et Libération poursui­vis pour diffamation par J.-M. Le Pen, accusé de tortures en Algérie. Seul ce montage a pu réchapper des ci­sailles, dont on a une synthèse, À propos de… l’autre détail (1988, 45′), consacrée au lieutenant tortionnaire, avec des analyses de Paul Teitgen et de Pierre Vidal-Naquet. On a là une réflexion sur les conséquences des lois d’amnistie sur l’écriture de l’Histoire, menée également par Henri Alleg.

Enfin, on peut s’étonner de films qui n’ont pas de liens directs avec l’Algérie, même si ce pays a été un refuge pour nombre de révolutionnaires du Tiers-Monde (comme le montre Alger : Révolution africaine, 2014, entretien entre René Vautier et l’historien Jacques Choukroun, 12′) : Le Glas (1964, 5′), sur la pendai­son de trois activistes en Rhodésie du Sud (actuel Zimbabwe), ou Frontline (1976, 74′), film contre l’Apar­theid en Afrique du Sud. Mais il s’agit là encore de luttes de libération.

Au total, malgré ses manques inévitables, l’intérêt du coffret est de restituer une certaine cohérence dans l’œuvre de René Vautier, en nous donnant un important (et très apprécié) aperçu de son travail sur l’Al­gérie. Il s’agit bien sûr de films militants (René Vautier conçoit son cinéma comme une arme de combat, qui doit « refléter les choses sous-jacentes à la réalité » filmée), mais c’est d’abord le regard plus complexe d’un cinéaste qui s’étale et évolue sur une cinquantaine d’années, tout en interrogeant les deux rives méditerra­néennes. L’enseignant y trou­vera ainsi matière à travailler tant sur la colonisation que la décolonisation et sur les lendemains difficiles de l’in­dépendance algérienne.

La question peut être posée de savoir sur quoi repose l’intérêt ou plutôt la passion que nourrit René Vautier pour l’Algérie. Ce serait oublier les jeunes années de ce fils d’un ouvrier et d’une institutrice, qui entre en Résistance à Quimper, d’abord par la poésie puis dans l’action directe : sa lutte pour l’indépendance et contre un occupant y trouve des racines directes. Ce serait aussi oublier ses premiers travaux à l’Institut des hautes études cinématographiques (IDHEC, 1946-1948), sur les manifestations contre le racisme, et surtout son premier film, Afrique 50 (1950), ouvertement anticolonialiste, alors qu’il est, à l’origine, une commande de la Ligue française de l’enseignement sur la mission éducative de la France en AOF. Il poursuit dans la même veine, avec Terre tunisienne (1951), qui lui vaut d’être expulsé du protectorat encore français. Très tôt, René Vautier est ce qu’il est convenu d’appeler un cinéaste « engagé », l’adjectif ne rendant compte que très faiblement des risques qu’il a pu prendre, loin des tables de montage et des tapis rouges.

Son expérience directe de la guerre d’Algérie, ses documentaires, sa collecte de témoignages, d’ar­chives, ses lectures (notamment le livre de Noël Favrelière, Le Désert à l’aube, 1960, qui inspire le person­nage de Nono), trouvent un point d’aboutissement provisoire avec Avoir Vingt Ans dans les Aurès, film de fic­tion qui lui permettra d’obtenir une grande reconnaissance avec le prix de la critique internationale qu’il reçoit à Cannes (1972). Une sorte de synthèse provisoire, qui se prolonge jusque dans les derniers mois de la vie de René Vautier, dont l’œuvre à elle-même semble contredire l’idée selon laquelle la guerre en Algérie n’a pas été l’objet de nombreux films : si cela est vrai de la fiction, le travail documentaire a été important, même si sa diffusion a été difficile. C’est un autre mérite de ce coffret que de nous le montrer.

 

Jean-Yves Le Naour (sc.), Iñaki Holgado et Marko (ill.), Aretha Battistutta (coul.), <i>Le réseau Comète. La ligne d'évasion des pilotes alliés</i>, Bamboo, coll. « Grand Angle », 56 p., 31 mai 2023. ISBN 978 2 8189 9395 8

Présentation de l'éditeur . « Des centaines de résistants de « l’armée des ombres », discrets, silencieux, un « ordre de la nuit » fait...