Présentation de l’éditeur. « C’est l’histoire méconnue d’un grand combat écologique gagné en France il y a 30 ans qui sert de modèle encore aujourd’hui dans de nombreux pays. De simples citoyens ont fait face aux grands lobbies et à la puissance politique et publique pour préserver le site naturel de Serre de la Fare, dans la vallée de la Haute Loire.
Alain Bujak est allé à la rencontre de ces hommes et ces femmes qui ont combattu ce projet de construction mais surtout qui ont su proposer d’autres solutions capables de se protéger des crues du fleuve tout en préservant cet espace naturel et ces paysages exceptionnels.
Serre de la Fare. Nous sommes à quelques kilomètres du mont
Gerbier-de-Jonc où la Loire prend sa source. À cet endroit, le fleuve
n’est encore qu’un torrent clair qui coule au sein d’un espace naturel
préservé de toute beauté. Et pourtant il s’en est fallu de peu qu’il
disparaisse sous les eaux.
En 1986, est annoncé la construction du barrage de Serre de la Fare. Un
chantier déclaré d’utilité publique inscrit dans le cadre d’un vaste
projet d’aménagement du bassin versant de la Loire. Un plan
d’investissement de grande envergure, soutenu par l’état. Car il faut
dompter la Loire, le dernier fleuve sauvage, pour se protéger de ses
crues parfois meurtrières, comme celle du 21 septembre 1980 qui fit 8
victimes.
Alain Bujak va rencontrer celles et ceux, de simples citoyens pour la plupart, qui vont s’opposer au projet de construction du barrage. Au sein de l’association Loire Vivante, ils vont, au fil des ans, bloquer le projet mais surtout, vont proposer des solutions alternatives. Six années de combat mené sur tous les fronts : juridique, médiatique, scientifique… qui aboutiront à l’abandon du projet et la mise en place d’un projet d’aménagement basé sur les propositions des opposants ».
Pour qui a parcouru un jour les rives de la Loire, du côté d’Arlempdes (Haute-Loire), l’ineptie du projet du barrage de Serre de la Fare apparaît dans toute son évidence. On a là un gros ruisseau coincé dans une gorge étroite, pas tout à fait une rivière. De gros galets ont été polis par l’eau, parmi quoi filent des poissons. Rien à voir avec le fleuve qu’est devenue la Loire telle qu’on la voie à Nantes ou même à Orléans.
Ce projet de barrage appartient donc à ce qu’on a depuis appelé les GTI : les grands travaux inutiles. UN témoignage de la supériorité de l’homme sur la nature : « la nature n’a pas à contrarier le progrès », pour reprendre la phrase que les auteurs mettent dans la bouche de Jean Royer, puissant maire de Tours qu’il n’a eu de cesse d’agrandir. Entre 1983 à 1995, il est président de l’Établissement public d’aménagement de la Loire et de ses affluents (EPALA [1]). C’est à ce titre qu’il entreprend d’aménager certains secteurs de la Loire, dont celui de Solignac-sur-Loire et du Goudet.
Alain Bujac et Damien Roudeau sont allés rendre visite à ceux qui se sont mobilisés contre le projet, qui fonde bientôt le comité Loire vivante et occupent le terrain : les prémices de ce qu’on appelle aujourd’hui des ZAD. Le récit est ainsi organisé chronologiquement, ce qui permet de bien mettre en lumière les premières actions et leurs limites, ainsi que ses difficultés : il n’y a pas de professionnels de la contestation sociale ; le mouvement ne bénéficie pas de l’appui des élus… Mais on voit, au fur et à mesure, comment cette lutte a gagné en notoriété, et comment s’est développé un ralliement international. On voit également que la sauvegarde de la Loire déborde largement le cadre écologiste : des commerçants acceptent les dépôts de documents ; la liste aux municipales de 1989 obtient un score très honorable, dans une ville de droite.
L’album allie subtilement les photographies et les dessins, à la manière d’un reportage illustré : cela lui donne le rythme nécessaire pour emmener le lecteur au gré des pages. Il repose sur des gens qui n’ont rien de pittoresque ou de marquant : des personnes simples, attachés à leur région. L’un d’entre eux le résume bien : « tous ces moments passés seul sur les bords de la Loire, Jérôme, sculpteur, à laisser aller mes pensées, à me construire… Tout cela allait disparaître…Ce territoire est un point d’ancrage dont j’ai profondément besoin, pour évoluer, réfléchir, créer ».
Notes
[1] Devenu aujourd’hui Établissement public Loire (EPL).
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