Présentation de l'éditeur. « Ce livre est le récit historique et romanesque de mai 68, dessiné par Sébastien Vassant, et nourri du vécu de Patrick Rotman et des entretiens inédits qu'il a réalisé auprès du pouvoir. Il y a 50 ans, une crise existentielle secoue la France. Dans Mai 68 : La veille du grand soir, le lecteur est là où l'histoire s'écrit, à la Sorbonne et à l’Élysée, aux usines Renault ou à la Préfecture. Il côtoie Cohn-Bendit, voit débattre Sartre. En contrepoint, les auteurs racontent aussi les atermoiements au sommet de l'état : les affrontements entre De Gaulle et Pompidou ou les négociations entre un Chirac armé jusqu'aux dents et la CGT... ».

 

 

 

Après Octobre 17 (dont le compte rendu de lecture a été publié ici), Patrick Rotman récidive avec Mai 68, mais avec un autre dessinateur. Benoît Blary avait officé dans le premier album ; là, c’est Sébastien Vassant, avec un style tout à fait différent, assez proche de celui d’Étienne Davaudeau (avis tout à fait subjectif). Sébastien Vassant n’est pas un novice en matière historique : il a collaboré avec Benjamin Stora (Histoire dessinée de la guerre d’Algérie, Seuil, octobre 2016, 190 p.).


On connaît Patrick Rotman, notamment comme auteur des deux tomes de Génération 1. Écrit avec son fréquent complice Hervé Hamon, le livre portait sur un Mai 68 long, puisqu’il s’agissait de considérer les protagonistes de ces événements, selon la terminologie de l’époque, dans la genèse de leur formation politique mais aussi dans ce qui suivra. Le regard balayait alors la fin des années cinquante pour se porter jusqu’au début des années soixante-dix.

Le propos du présent ouvrage est beaucoup plus ramassé dans le temps, puisque c’est le seul mois de mai 1968 qui a été retenu ; du 3 mai au 3 juillet, pour être plus précis, ce qui n’empêche quelques retours en arrière (sur le 22 mars, par exemple). Mais ce choix permet d’aborder les choses du point de vue des manifestants que de celui du pouvoir, ce qui n’était pas le parti pris pour Génération. On suit ici un étudiant de la Sorbonne, très studieux, faiblement politisé, ce qui offre au lecteur un point de repère intéressant : on n’a pas affaire à un «gauchiste» (on dirait un «membre de l’ultra-gauche», aujourd’hui…), mais à un être assez banal, ouvert sur ce qui se passe autour de moi, malgré tout. Un jeune homme auquel on peut s’identifier facilement. Il prépare les examens de fin d’année, mais peu à peu, sous l’influence de camarades, il s’implique de plus en plus dans le mouvement. Il s’interroge sur ce qui le constitue, et, ce faisant, on entre dans des explications directes de ces manifestations.
De l’autre côté, on est frappé par l’attitude d’un pouvoir politique complètement dépassé. De Gaulle est peint en homme du passé (ou du passif), qui ne cherche qu’à réduire le mouvement par tous les moyens, y compris (et peut-être d’abord) par la force. Son aveuglement et son entêtement sont limités par certains membres du gouvernement, qui estiment au contraire que l’usage de la force risque de jouer comme un élément d’amplification, attirant à lui les plus tièdes. Il faut donc gagner du temps, négocier, attendre l’essoufflement qui se produira forcément. Pour cela, il faut composer avec le parti communiste et la CGT, qui, au contraire de ce que pense de Gaulle, cherchent à calmer la révolte.

L’ouvrage est bien rythmé, notamment par les va-et-vient d’un milieu à un autre, des étudiants à Baden-Baden, de l’usine Renault à Billancourt à l’Élysée. Le procédé permet en outre de mieux marquer l’opposition de générations. On soulignera enfin le dossier final qui rassemble des photographies de murs, et la chronologie qui court du 22 mars au 30 juin.
Un regret tout de même. Les auteurs se sont concentrés sur Paris uniquement. Or, le renouvellement historiographique qui s’accentue montre à quel point le reste du pays a été impliqué dans le mouvement, quitte à le précéder. Et on le trouve là où on ne s’y attend pas forcément, dans le milieu agricole, dans le Languedoc et surtout la Bretagne, par exemple 2
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Notes