Ce deuxième tome poursuit la transposition en fiction de l’implantation conflictuelle – et finalement ratée – de Carrefour en Corée. Cet opus montre comment les salariés peuvent se fédérer face au pouvoir des multinationales, et notamment à quel point cette organisation collective peut se révéler difficile quand on est face à un patron passé maître dans la technique de « diviser pour mieux régner ».
Remarquable de maîtrise et de brio, Choi Kyu-sok continue de dépeindre avec finesse les rouages du système propre aux grandes entreprises et de brosser un portrait complexe et nuancé de la société coréenne contemporaine, en mettant en lumière, plus particulièrement dans ce volume, le rôle essentiel du syndicalisme coréen ».
Le premier volume d’Intraitable, sorti en octobre 2019, a fait l’objet d’un compte rendu sur le présent site. On retrouvera bien évidemment les mêmes qualités, à la fois dans le déroulement du récit que dans sa restitution graphique.
L’auteur, Choi Kyu-sok, nous plonge à nouveau dans le contexte social
extrêmement tendu de la Corée du Sud, en prenant un exemple tiré de la
réalité. Il expose en effet les pratiques de gestion (on dit
« managériales ») personnel d’une multinationale française, spécialisée
dans la grande distribution (il s’agit de Carrefour). Les employés sont
placés sous une pression permanente et croissante, afin que l’on puisse
tirer le maximum de la ressource humaine qu’ils représentent. Choi
Kyu-sok nous avait aussi montré, dans le premier volume, que face à
l’emprise du groupe industriel, la résistance est non seulement
possible, mais qu’elle pouvait s’exercer. Les salariés avait pu
commencer à se défendre, très difficilement, soutenus par une sorte
d’agence donnant des conseils, dirigée par le militant syndical Gu
go-shin. Cette fois, les choses prennent de l’ampleur : un salarié,
brutalement licencié, réussit à avoir gain de cause. Surtout, il doit
cette victoire non pas à sa seule force, mais à un soutien beaucoup plus
large. Chacun (en tout cas, beaucoup de salariés) prennent conscience
que l’action peut être efficace pour défendre ses droits à la condition
de s’unir. C’est ici qu’un personnage est particulièrement mis en
lumière : Lee Soo-in. Il s’agit d’un jeune cadre du groupe industriel,
qui est aussi un ancien officier de l’armée coréenne. Son passé l’a
exposé à de graves injustices. Aussi, la situation sociale au sein de
son entreprise ne le laisse pas indifférent, et il décide d’aider les
employés en favorisant la création d’un syndicat.
Choi Kyu-sok ne nous épargne rien de la violence sociale qui s’exerce,
ni des tergiversations des salariés qui y sont confrontés. Que faire
face aux ordres, aux pressions ? Faire le dos rond, c’est peut-être la
garantie (fragile) de ne pas être renvoyé. Mais les exemples de
licenciement abusifs servent de leçon, surtout quand leur caractère peut
être retenu par la justice. Dès lors, la véritable garantie passe par
une organisation collective de défense.
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